Arménie : petite histoire de la grenade - Հայաստան. նռան մի փոքր պատմություն Serge Tateossian Source : Geo Magazine

Arménie : petite histoire de la grenade


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Arménie : petite histoire de la grenade


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Qu’on déambule sur le marché aux puces d’Erevan ou qu’on fasse le tour des étals de fruits et légumes de n’importe quelle bourgade d’Arménie, la grenade est partout.

CAROLE SATURNO Publié le 12/11/2018 à 18h18 - Mis à jour le 29/06/2022

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Après tout, elle est l’emblème de ce petit pays du Caucase, indépendant depuis 1991. Les habitants prétendent même que ce fruit résume l’histoire et la géographie de leur nation : un peu austère à l’extérieur, mais si riche à l’intérieur ! Une croyance prétend aussi que chaque grenade contient 365 arilles exactement, une pour chaque jour de l’année. Les arilles, ce sont ces pépins entourés d’une pulpe écarlate, au jus plus ou moins acide mais toujours vivifiant, et bourré d’antioxydants. Cultivée depuis trois millénaires en Arménie, cette baie n’a pas qu’une fonction nutritive. Avec sa couleur sang, elle symbolise la prospérité, la fécondité, la longévité, bref, la vie. Pas un mariage n’est célébré sans que l’heureux couple ne lance une grenade contre un mur, pour que les grains du fruit éclaté bénissent sa descendance. Pas un Noël sans qu’elle soit au menu, pour que l’année s’ouvre sous le signe de la vitalité… Des superstitions qui puisent sans doute leur source dans les textes bibliques. Quand l’arche de Noé s’échoua sur les pentes du mont Ararat, qui culmine à 5 165 mètres non loin de la capitale arménienne, elle transportait, outre deux représentants de chaque espèce animale, quelques fruits, dont, bien sûr, la grenade. Et à en croire certains Arméniens, la savoureuse baie pourpre pourrait bien être la fameuse «pomme» qu’Eve a croquée dans le jardin d’Eden…

Ce fruit du paradis assure aussi une substantielle source de revenus aux paysans du sud. Notamment ceux de Nrnadzor, un village montagneux dont le nom signifie «vallée aux grenades». Les grenadiers, arbustes pouvant vivre jusqu’à deux siècles, s’y déploient à perte de vue. Avant la récolte automnale, leurs fleurs rouge vif constellent les coteaux. D’une qualité exceptionnelle, les fruits sont cueillis à la main. Les plus gros sont envoyés à la capitale, les plus petits servent à concocter un vin doux et sucré qui n’est pas sans rappeler le porto ou le xérès. A Nrnadzor, les agriculteurs sont parfois considérés comme des héros… car il leur faut composer avec les humeurs des ours ! Les plantigrades font régulièrement des razzias dans leurs vergers : humains ou animaux, tous en Arménie raffolent de la grenade.

A lire : Exposition Grenade
https://www.armenia.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=81&Itemid=87


Comment manger la grenade

Typique du Caucase et de l’Asie centrale, le grenadier est aujourd’hui cultivé dans le bassin méditerranéen, et jusqu’en Amérique, depuis que les conquistadores l’y ont importé. Les fruits que l’on trouve en France proviennent souvent d’Espagne ou d’Italie. Mais les déguster n’est pas si aisé. La bonne méthode consiste à d’abord couper la couronne de la grenade, ainsi que sa base. Puis à entailler sa peau verticalement, en traçant cinq quartiers, pour qu’elle s’ouvre facilement. Cette baie se savoure nature, mais elle peut aussi réveiller un bol de yaourt, apporter une note de fraîcheur à un tzatziki ou faire des miracles sur des huîtres… Et la mélasse de grenade, un sirop aigre-doux qu’on trouve dans les épiceries orientales, s’utilise comme du vinaigre balsamique.