Canonisation de Charles de Foucauld témoin des massacres hamidiens

Explorateur, géographe à la vie dissolue, issu d’une famille de la vieille noblesse française, né le 15 septembre 1858 à Strasbourg, Charles de Foucauld, auteur d’une grammaire et d’un dictionnaire français-touareg et touareg-français, ancien officier, ordonné prêtre à 43 ans, celui-ci prendra la route de la Syrie, puis de Palestine pour s’installer plus tard à Beni-Abbès dans le Sahara algérien. Sa quête de pauvreté, d’abnégation et de pénitence le pousse à quitter La Trappe afin de devenir ermite en 1897. Il sera assassiné par des rebelles Senousis (1)

En 1895, Charles de Foucauld est témoin des persécutions et massacres perpétrés sur la population arménienne, sur ordre du sanguinaire sultan Abdul Hamid II, sans que l’Europe ne bouge. Il écrira à son beau-frère Raymond de Blic : « Dans la ville la plus proche, à dix lieues d’ici, la garnison on a tué 4500 chrétiens en deux jours. Les Européens sont protégés : on a même mis un poste de soldats à notre porte. Quelle douleur d’être si bien avec ceux qui égorgent nos frères ! C’est honteux pour l’Europe ! »

Le 20 novembre 1895 il écrit à sa cousine Madame de Bondic : « … il y a eu des horreurs, une foule de massacres, d’incendies, de pillages. Beaucoup de chrétiens ont été réellement martyrs, car ils sont morts volontairement, sans se défendre plutôt que de renier leur foi. Il reste dans ce malheureux pays une misère effroyable. L’hiver est très rigoureux, je ne sais comment ces malheureux, desquels on a brûlé les maisons et pris tous les biens, feront pour ne pas mourir de faim et de froid. Je vous écris pour vous quêter… Par ordre du Sultan, on a massacré près de 140 000 chrétiens depuis quelques mois. Dans la ville la plus proche d’ici, à Marache, la garnison a tué 4500 chrétiens en deux jours… »

Le 21 février 1896, il écrit de nouveau à sa cousine : « Il est vrai que le monde a si peu connu ce qui se passait ici, le gouvernement turc ayant acheté la presse, ayant donné des sommes énormes à certains journaux, pour ne publier que les dépêches émanant de lui. Mais les gouvernements savent toute la vérité par les ambassades et les consulats. Quels châtiments de Dieu ne se préparent-ils pas par de telles ignominies ! »

Les massacres hamidiens ont fait plus de 250 000 victimes innocentes.

Le 24 janvier 1897, Charles de Foucauld écrit enfin au père Jérôme, trappiste au monastère de Staouëli en Algérie : « Quelle vocation, mon cher frère, et combien je bénis Dieu de vous l’avoir donnée. Une fois, j’ai regretté de ne pas l’avoir reçue, de ne pas être revêtu de ce saint caractère. J’aurais voulu être prêtre, savoir la langue des pauvres chrétiens persécutés, et pouvoir aller, de village en village, les encourager à mourir pour leur Dieu. Je n’en étais pas digne. »

C’est à la suite de cette épouvantable vision du carnage perpétré sur les Arméniens que de Foucauld aurait pensé à prendre la prêtrise pour apporter une aide spirituelle, dans la prière et les sacrements. Il sera ordonné prêtre en 1901 à Viviers en Ardèche, où historiquement, les évêques furent les seigneurs temporels les plus puissants de la région durant une grande partie de l’époque médiévale avant de faire allégeance au roi de France, en 1308.

Charles de Foucauld meurt le 1er décembre 1916, à l’âge de 58 ans, à Tamanrasset, fait prisonnier dans un fortin et abattu froidement par un membre de la tribu Senousi.

Son procès en béatification commence dès 1927. Interrompu durant la guerre d’Algérie, il reprend ultérieurement et Charles de Foucauld est déclaré vénérable le 24 avril 2001 par Jean-Paul II, puis bienheureux le 13 novembre 2005 par Benoît XVI. Le pape François signe le 27 mai 2020 le décret reconnaissant un miracle (2016) attribué au bienheureux, ouvrant la porte à sa canonisation.

(1) Confrérie religieuse musulmane fondée à la Mecque en 1837 par le Grand Senussi Sayyid Muhammad ibn Ali as-Senussi (1791–1859) qui s’est implanté en Libye, au Tchad, en Algérie, au Soudan, au Niger et en Égypte. La confrérie a combattu la présence italienne et française et a accédé au trône en Libye.

(de sources diverses) Jean Eckian

par Jean Eckian le dimanche 15 mai 2022
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